Pirelli va-t-il obliger les écuries à revoir leur voiture ?
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Pirelli va-t-il obliger les écuries à revoir leur voiture ?
Au-delà de son bien-fondé – question complexe (changer les règles du jeu en cours de saison pour satisfaire certaines équipes mais aussi pour éviter des délaminages trop fréquents) –, la décision de Pirelli de modifier ses pneumatiques d’ici le Grand Prix du Canada aura des répercussions sur l’aérodynamique et les suspensions des monoplaces. La combinaison d’une construction proche de celle utilisée en 2012 avec des composants 2013 n’a en effet jamais été testée par les écuries, qui vont devoir adapter leur voiture en se fondant sur des simulations, puisqu’aucune séance d’essais préparatoire ne sera organisée.
Question de déformation…
On le sait, les pneus, qui représentent 30 à 40 % de la surface frontale d’une F1, ont une grande incidence sur le flux d’air circulant autour de la voiture, pas seulement en raison de leur taille ou de leur profil, plus ou moins grands, mais aussi à cause de la déformation de leurs flancs. En tournant à des vitesses très élevées, ils créent des tourbillons d’air qui modifient la circulation de l’air sur toute la monoplace et se déforment selon des forces centrifuges, provoquant ainsi une modification des flancs et de la surface de contact.
“Comme vous pouvez l’imaginer, confirme Paul Hembery, le patron de Pirelli Motorsport, il va y avoir beaucoup de travail sur le plan aérodynamique, puisque les pneumatiques peuvent avoir une influence là-dessus, selon la manière dont ils se déforment. Les écuries attendent donc que nous leur envoyions des données le plus tôt possible, afin qu’elles puissent se préparer d’ici Montréal.”
Depuis son retour en Grand Prix en 2011, Pirelli fournit des pneumatiques en caoutchouc à une échelle de 60 % pour permettre aux écuries de tenir compte de la déformation des pneus pendant leurs sessions de travail en soufflerie. Le but est que cette reproduction reproduise aussi fidèlement que possible le comportement du pneu en course. Il ne s’agit pas de mesurer l’usure de la gomme (les tapis roulants des tunnels sont en acier, pas en bitume) mais bien d’imiter la distorsion des enveloppes.
En modifiant ses pneus, Pirelli fait des heureux (à gauche, Christian Horner de Red Bull, Toto Wolff de Mercedes, sous l’œil de Bernie Ecclestone) et des mécontents (dont Ferrari, à droite).
Pour anticiper les changements planifiés pour le Canada, les écuries vont par conséquent devoir réutiliser les pneus de soufflerie 2012 sur leur maquette de châssis 2013, et combiner les données obtenues avec les informations concernant les mélanges de gomme de cette année… Beau casse-tête en perspective ! Selon les résultats de leurs simulations, les teams pourraient devoir modifier l’aileron avant (situé tout près des pneus) et peut-être même une partie de la zone des échappements. En effet, par leur rotation, les roues et pneus arrière créent des turbulences et envoient un flux d’air non désiré vers le diffuseur (“tyre squirt” en anglais), qui en perturbe le fonctionnement (les échappements à effet de Coanda visent notamment à protéger le diffuseur de ces turbulences, comme nous l’avons expliqué ici).
Les dérives latérales, ainsi que les écopes de frein, pourraient également devoir être redessinées. Comme l'explique Mark Gillan,responsable des opérations chez Williams jusqu’à la fin de la saison 2012, les conséquences potentielles sont importantes : “Il est peu probable qu’un changement de structure puisse être opéré sans affecter la forme du pneumatique et donc la surface de contact du pneu avec le sol. Cela modifiera l’écoulement du flux d’air sous le fond plat de la voiture. Les équipes ont passé des mois à simuler cet écoulement en soufflerie et en CFD, et, si l’écoulement change même de quelques millimètres, cela aura des répercussions sur la façon dont l’aileron avant interagit avec les pneus et avec l’écoulement d’air le long de la voiture et sous le fond plat. L’équilibre aéro de la voiture sera affecté.”
… et de suspensions
Même s’ils sont beaucoup plus rigides que leurs homologues de route, les pneumatiques de F1 se déforment (un peu) et absorbent les irrégularités de la piste. Leur forme bombée agit d’ailleurs comme une sorte de suspension, puisqu’une bonne part des mouvements verticaux de la voiture sont absorbés par eux plutôt que par le débattement des amortisseurs. C'est dire si leur capacité d’absorption détermine en partie le dessin de la suspension, et conditionne, peu ou prou, le dessin global de la voiture, comme le souligne Éric Boullier, déçu par la décision du manufacturier italien : “Contrairement peut-être à Red Bull, qui a une politique de développement de la voiture uniquement fondée sur l’aérodynamique, nous, nous faisons partie des équipes qui, comme Ferrari, tiennent compte, dans le design de la voiture, du paramètre pneumatique Pirelli, puisque cela fait partie de la performance du week-end.”
Modifier la structure du pneu va dès lors obliger les ingénieurs à revoir les géométries de suspension, et peut-être même à fabriquer de nouveaux amortisseurs et triangles. Pirelli va fournir aux équipes des modèles mathématiques (les “modèles de Pacejka”, qui sont des équations interpolées de résultats expérimentaux, donc en principe assez réalistes) afin de les aider à prévoir, en simulation, le comportement de leur voiture avec les pneus modifiés.
Quelle que soit l’ampleur des répercussions qu’auront les nouveaux Pirelli, les écuries vont en tout cas devoir consacrer beaucoup de temps et de ressources pour évaluer précisément leur impact. Et c’est sans doute là que le bât blesse. Si la décision de Pirelli pour dégonfler la polémique soulève une tempête de protestations de la part de Lotus et de Ferrari (cliquez ici pour lire notre article) et un tourbillon d’interrogations, elle bouleverse surtout le programme de travail des équipes au plus mauvais moment.
Car même si les ingénieurs connaissent le comportement et les propriétés de déformation des gommes de l’an passé, cette surcharge de travail survient alors qu’ils avaient prévu de ne plus travailler sur les bolides de cette année et de se pencher sur le titanesque chantier 2014
http://www.f1i.com/f1i-features/pirelli-va-t-il-obliger-les-ecuries-a-remanier-leur-voiture/
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