Ginny Williams La puissance d'une femme

• Ginny Williams
  

La puissance d'une femme
Maurice Hamilton
26 juin 2013

À Brands Hatch en 1986, Virginia 'Ginny' Williams reçoit le trophée des constructeurs au nom de son mari, qui récupérait de l'accident l'ayant laissé paralysé sous la poitrine


L'écurie Williams est sur le point de fêter son 600e Grand Prix, mais Sir Frank sera le premier à vous dire que rien de tout cela n'aurait été possible sans la courageuse dame dont la vie a été célébrée mardi matin à Londres.
Plus de 250 personnes, dont un grand nombre provenaient de la Formule 1, se sont réunies à Knightsbridge pour se souvenir de Lady Virginia 'Ginny' Williams. Le vicaire de l'église Saint-Paul a bien résumé le sentiment et la raison-d'être de l'événement lorsqu'il a souligné que Lady Williams a succombé au cancer au cours d'une triste journée froide de mars, mais qu'en cette matinée ensoleillée de juin, il était temps de remémorer le passage d'une vie pleine et active.
Les faits, et ils sont charmants, sont que Ginny Williams est tombée follement en amour avec Frank dès le premier regard, même s'il avait peu de chair sur ses os. Habituellement, lors d'une telle histoire romantique, il serait bon d'ajouter que l'homme en question avait des trous dans ses souliers et portait un habit usé, mais les priorités de Frank étaient telles que peu importe sa situation financière difficile, il continuait à placer les vêtements sur mesure juste derrière Cosworth Engineering sur sa liste des choses essentielles à la survie.
Le milieu aisé de Ginny s'est avéré plutôt utile en 1973 lorsqu'elle a vendu son appartement de Londres (sans que sa famille le sache) pour aider à financer les activités de course de Frank. Elle a été la complice de Frank lorsqu'ils ont convaincu plusieurs propriétaires qu'ils seraient de parfaits locataires pour leurs maisons alors qu'en fait, ils devaient emprunter pour le premier paiement. Et ne pensons même pas aux fonds nécessaires pour payer le loyer du mois suivant.
Ce fut une histoire similaire pour l'usine louée où Frank a installé sa jeune équipe. L'arrivée fréquente de huissiers faisait en sorte que son bureau était souvent rapidement transféré dans une cabine téléphonique au bout de la rue. Ginny était peut-être de petite taille, mais elle avait une énorme force intérieure alors qu'elle soutenait son mari dans cette lutte pour leur survie.


Ginny et Frank Williams à Barcelone en mai 2012, lors du 70e anniversaire de ce dernier



Lorsqu'ils se sont éventuellement mariés en août 1974, Frank s'est permis suffisamment de temps pour quitter l'usine, sourire pendant toute la cérémonie et ensuite retourner au boulot, s'excusant à profusion de s'absenter d'un repas que Ginny avait organisé avec le témoin de leur mariage et son épouse. "Je suis terriblement désolé, un Grand Prix approche, vous savez ce que c'est..."
L'équipe de Frank creusait un trou pour en boucher un autre. Il envoyait deux ou trois mécanos chez Goodyear pour fouiller parmi les pièces abandonnées de Ferrari et voir si quelques-unes pourraient leur servir lors des essais libres. Souvent, Frank empruntait de l'argent à Bernie Ecclestone ou à Ken Tyrrell pour acheter suffisamment de diesel pour retourner son camion à l'usine, et Frank en gardait une petite partie pour payer le parking de l'aéroport lorsqu'il atterrissait à Heahthrow.
Tout cela a changé en 1977 suite à la fondation de Williams Grand Prix Engineering, avec Patrick Head, et à l'arrivée de sponsors plus intéressants. Lorsque l'écurie Williams a remporté son premier Grand Prix, à Silverstone en 1979, Monsieur et Madame Williams avaient enfin un bon toit au-dessus de leurs têtes et donc un endroit qui permettait à Ginny d'exercer son talent exquis pour la décoration et le design.
Leur mode de vie bien mérité s'est effondré en mars 1986 lorsque Frank a eu un accident de voiture qui le laissera en chaise roulante pour le reste de sa vie. Et il a été chanceux de se rendre aussi loin. Si ce n'avait été de sa grande persistance et de son refus catégorique d'accepter le diagnostic des médecins, Frank serait décédé dans un hôpital français.
La nature combative de Ginny a fonctionné en parallèle avec le refus de Frank de se prendre en pitié, mais nul ne pouvait ignorer que leurs vies avaient changé pour toujours. Dans son livre (A different kind of life - Une vie différente, paru en 1991), Ginny a étalé ses pensées de manière très honnête et émouvante pour un sujet aussi personnel. Son histoire aide à comprendre à quel point ce jalon très significatif de 600 Grands Prix a été atteint grâce à beaucoup plus que de l'ingénierie, des finances et de l'organisation.
Le dicton paraphrasé "Derrière chaque grand homme et chaque Grand Prix se cache une grande femme" n'aura jamais été aussi vrai que dans ce cas-ci.
Dorénavant, les monoplaces Williams porteront sur leur carrosserie l'image d'un cercle contenant un papillon et les initiales de Virginia Williams.
© ESPN EMEA Ltd.

http://fr.espnf1.com/williams/motorsport/story/112599.html