Gerhard Berger, la difficile succession
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Gerhard Berger, la difficile succession
Après Jochen Rindt et Niki Lauda, l’Autriche voyait en Gerhard Berger le digne successeur à la lignée de champions nationaux. Mais il n’est pas facile d’assumer un tel héritage. S’il ne fut pas champion du monde, la carrière du pilote de Wörgl fut tout de même assez fantastique, à une époque où les prodiges étaient nombreux.
Un début difficile
Débutant sa carrière au GP d’Autriche 1984 au sein du modeste team ATS, Berger vivait son entrée dans le grand bain dans l’ombre de son illustre compatriote Niki Lauda, alors en passe de remporter son troisième titre mondial face à Alain Prost. Le team ATS en manque de moyens, le jeune Autrichien fut absent au Pays-Bas, et inscrit le point de la 6ème place à Monza. Cette performance lui permettra de garantir sa place pour la saison 1985, en intégrant le team Arrows.
Au sein du team anglais, Berger cotoya le Belge Thierry Boutsen, et s’inclina sévèrement 11pts à 3, avec en prime un podium pour son équipier au cours d’une course à élimination sur le circuit d’Imola. Berger, souvent victime de la fiabilité de sa machine, démontre une nouvelle fois sa rapidité et sa combativité. Le team Benetton, rachetant une équipe Toleman en pleine déconfiture, enrôla l’Autrichien pour 1986. C’est à l’occasion de cette saison que Berger va se faire remarquer par les top-teams.
Laminant son équipier Teo Fabi, Gerhard a inscrit 17pts (sur les 19 marqués par le team), dont une belle victoire acquise au Méxique, dominant ainsi les quatre fantastiques qu’étaient Alain Prost, Ayrton Senna, Nelson Piquet et Nigel Mansell. En crevant l’écran de cette manière, Berger s’est ouvert les portes de la Scuderia pour la saison 1987, avec pour mission d’épauler Michele Alboreto afin de redonner à Ferrari son lustre d’antan.
Ferrari, première
Pilote dur et peu spectaculaire, Berger était néanmoins efficace et très fiable malgré sa jeune expérience. Et si Ferrari sera incapable de se battre pour le titre face à Williams, McLaren et Lotus. Le début de saison sera calamiteux et la paire Berger/Alboreto remontera le retard pris au championnat de manière très convaincante. Gerhard signera d’ailleurs deux très belles victoires au Japon et en Australie, après avoir cèdé dans les derniers tours à un Prost redoutable sur le circuit d’Estoril. Cinquième du championnat, Berger continue ainsi son ascension, et s’affirme dans le paddock comme un pilote redoutable et plein de sang froid.
Malheureusement pour lui, la saison 1988 fut le théâtre de l’hégémonie de l’association McLaren-Honda-Prost-Senna. Malgré cette domination sans partage du team de Woking (15 victoires sur 16 GP), Berger exploita la seule possibilité de victoire de l’année. A Monza, après avoir mis la pression sur le leader Ayrton Senna, les deux Ferrari profitèrent de l’accrochage entre le futur champion du monde et la Williams de Schlesser, triomphant quelques semaines après le décès d’Enzo Ferrari. Berger devançant Aboreto, une fois de plus, a rendu un vibrant hommage au Commendatore. Malgré la domination du duo Prost/Senna, Berger termina à la troisième place du championnat du monde.
En 1989, Gerhard Berger étrenna la célèbre Ferrari 639, monoplace ultramoderne créée par le génial John Barnard, et équipée d’une inédite boite de vitesses à sélection séquentielle. Dans cette aventure, il fut rejoint au sein de la Scuderia par Nigel Mansell, au détriment de Michele Alboreto, dominé durant deux saisons par l’Autrichien. Victime de la fiabilité aléatoire de sa Ferrari, Berger a subi la loi de Mansell durant la saison, même s’il a réussi à remporter le GP du Portugal à Estoril. Faisant mieux que Berger, Mansell gagna sa place pour 1990 au sein du team italien, où il sera associé à Alain Prost, champion du monde en titre. Berger, lui, fit le chemin inverse en rejoignant Ayrton Senna chez McLaren.
L’amitié plutôt que l’ambition
La saison 1990 fut celle où Berger s’est résigné à ses espoirs de titre. Au sein d’une équipe entièrement dévouée à Ayrton Senna, l’Autrichien a vite compris qu’il ne pouvait pas soutenir la comparaison avec son illustre coéquipier. Plus humble que Mansell, Berger livra donc un combat face à la Scuderia afin d’aider son team à décrocher les deux couronnes, pilote et constructeur, ce qu’il réalisa avec brio, devançant ainsi son ancien équipier au championnat où il prit à nouveau la troisième place, même si aucune victoire ne le récompensa de ses efforts. C’est la première fois depuis 1985 que l’Autrichien n’a pas remporté le moindre GP.
Berger et Senna sont très vite devenus amis, car si le comportement du Pauliste en piste l’empêchait de se lier avec un concurrent direct (comme Prost), la dévotion de Berger n’était pas un obstacle, et le charisme d’Ayrton était réel hors de sa voiture. Loyaux l’un envers l’autre, le duo remporta une nouvelle fois les deux championnats, Gerhard finissant à la quatrième place du classement des pilotes. Son leader Senna lui offrit une émouvante victoire au Japon, victoire qui faisait défaut à l’Autrichien depuis 1989. Rapide, souvent proche des temps de Senna en qualifications mais rarement devant, Berger avait semble-t-il compris qu’il ne pourrait pas lutter face aux géants de la discipline. Dès lors, il acceptait son rôle, lui garantissant ainsi de se battre aux avant-postes, plutôt que d’être le leader d’une écurie de bas de tableau.
L’année 1992 montrera plusieurs choses. D’une, que le titre n’était pas joué d’avance pour Senna, malgré l’année sabbatique de son grand rival Prost. D’autre part, que le Brésilien pouvait être mis en difficulté par son équipier, classé pourtant comme "porteur d’eau". Face aux géniales Williams-Renault de Nigel Mansell et Riccardo Patrese, les McLaren-Honda ont mordu la poussière, subissant du même coup la loi d’un jeune inconnu, l’Allemand Michael Schumacher. Alors que Mansell survolait le reste du plateau, Patrese étant incapble de suivre son rythme, Senna semblait mal vivre la domination du Britannique. Vainqueur à trois reprises en 1992, le Pauliste voyait d’un très mauvais oeil d’être sorti de la course au titre de cette façon. De plus, le retrait de Honda prévu pour la fin de saison le contrariait terriblement. Dès lors, le triple champion du monde était plus motivé à garantir son avenir pour 1993 qu’à se battre sur la piste. Dans ces circonstances, Berger a fait valoir sa fiabilité, son efficacité et sa sagesse pour faire jeu égal avec son prestigieux leader. Victorieux à Montréal et à Adélaïde, l’Autrichien signait par cette prestation ses adieux au team McLaren, tout en terminant à un petit point de Senna au championnat. Berger n’a pas su résister aux appels d’une Scuderia aux abois, en panne de résultat et de confiance. Gerhard, attaché au team de Maranello, se décida à rejoindre Ferrari pour la deuxième fois de sa carrière, fuyant un team McLaren en train de perdre pied.
Au chevet de la Scuderia
Ferrari est au fond du gouffre lorsque Gerhard Berger a rejoint Maranello. Après la débâcle de la campagne de 1991, aboutissant sur les limogeages de Cesare Fiorio, Alain Prost et Piero Fusaro, la Scuderia pensait refaire surface en 1992, emmenée par le fidèle et talentueux Jean Alesi. Mais la réalité fut bien plus dure, et c’est Ivan Capelli, deuxième pilote, qui en fit les frais. Ferrari était minée par les conflits internes, et il était grand temps de ramener un peu de sérénité au sein du team. Alors Maranello compta sur Alesi, et sur le retour de Berger. Luca Di Montezemolo, président de Automobili Ferrari, ne pouvait plus supporter cette situation d’échec. Et pourtant, 1993 ressembla beaucoup à 92, à ceci près que le duo de pilotes demblait plus complémentaire. Avec seulement trois podiums (deux pour Alesi, un pour Berger), la firme historique semblait bien malade. En juillet, Montezemolo fit appel à Jean Todt, qui avait réussi à faire gagner Peugeot en Rallye, en Rallye-Raid et en Endurance. Berger, lui, rêvait de redonner au team son lustre d’antan, et se lia d’amitié avec le fougueux Alesi.
Les sentiments de l’Autrichien étaient très divergents en 1994. Ferrari semblait revenir aux avant-postes, mais la saison commençait mal, avec une blessure d’Alesi en essais privés. Puis ce fut Imola, où Berger perdit en un week-end son jeune compatriote Roland Ratzenberger puis son ami Ayrton Senna. Pouvant viser la victoire, Berger abandonna sans que la mécanique y soit pour quoique se soit. Jean Todt évoqua un problème d’ammortisseur, mais Berger affronta les médias en expliquant "comment voulez-vous piloter une monoplace les yeux embués par les larmes?" La suite de la saison sera marquée par la victoire de Berger au GP d’Allemagne à Hockeinheim, circuit totalement maîtrisé par le pilote autrichien. Berger a réussi, il a redonné en moins de deux ans les joies de la victoire à son team. Biensûr, certaines voix se sont élevées pour expliquer la chance de Berger à l’occasion de ce GP. Schumacher et Alesi avait abandonné sur surchauffe moteur pourle premier, problème électrique pour le second. Mais avant ça, Berger avait signé la pole devant Alesi, et dominé le champion allemand. Sa victoire ne devait rien à la chance. Du même coup, Ferrari récupéra la troisième place au championnat, au détriment du team McLaren en crise.
En 1995, Alesi et Berger pensait pouvoir redonner un titre à la Scuderia. Loin de sa devancière, la 412T2 était une monoplace simple, performante et... belle. Et Berger s’enthousiasmait face à sa monoplace en début de saison. "Quand une F1 est belle, elle va généralement vite". Et il avait raison, elle allait vite cette Ferrari. Malheureusement, elle n’allait pas très loin. Les ingénieurs de la Scuderia avait tout fait pour fiabiliser le moteur, mais les autres compartiments en ont pâtit. Dès lors, une seule victoire couronna cette monoplace, celle de Jean Alesi à Montréal. Comme en 1990, le team italien s’est pris les pieds dans le tapis pour des broutilles, et les raisons des abandons sont édifiantes: panne de batterie, rupture de roulement de roue, écrou mal serré, caméra embarquée mal fixée, attache de suspension défectueuse... Alors que la régularité du duo de pilotes aurait pu permettre à la Scuderia de jouer le titre constructeur face au duo hétérogène de Benetton-Renault et aux errements de Williams-Renault, le manque de sérieux dans la réalisation de la Ferrari a compromis ses chances. La Scuderia a donc échoué à la troisème place, une nouvelle fois, et empêchant ses pilotes de défendre leurs chances de victoire.
Dernière ligne droite
Lassé par trois saisons difficiles, où il n’a obtenu qu’une seule victoire, Berger a répondu aux avances de Benetton-Renault pour 1996, dans l’espoir de décrocher quelques victoires avant la fin de sa carrière. Il fut rejoint par son ami Jean Alesi, trahi par Jean Todt quand celui-ci a voulu en faire un pilote n°2 derrière Michael Schumacher. Malheureusement, Alesi semblait faire figure de "chat noir", et la B196 s’avéra bien moins véloce que sa devancière. Néanmoins, les deux pilotes ont connu une saison honorable, bien que les errements connus chez Ferrari en 1995 semblaient les avoir suivis. Le duo n’a eu que deux possibilités de victoire en 1996, saison dominée par les Williams-Renault de Damon Hill et Jacques Villeneuve. A Monaco, Alesi dominait habilement ses poursuivants quand un affaissement de suspension le contraignit à abandonner. Quelques semaines plus tard, le sort fut bien plus cruel pour Berger. Abandonnant à Monaco sur un bris de boite de vitesses alors qu’il suivait son équipier, c’est son moteur Renault qui cassa, laissant la victoire à Damon Hill à deux tours de l’arrivée du GP d’Allemagne. Berger ne masque pas sa déception et son ras-le-bol devant ces lacunes, et mis avec Alesi la pression sur Flavio Briatore pour 1997.
Briatore n’est pas homme qu’on menace, et il fit savoir très tôt que 1997 serait la dernière saison de la paire Alesi/Berger. Devant ce constat, l’Autrichien décida de raccrocher son casque à la fin de l’exercice. Une fois encore, chaque pilote à eu l’occasion de vaincre cette saison. Et Berger put en profiter cette fois, triomphant sur le circuit d’Hockeinheim, qu’il domina une fois de plus devant Schumacher, pourtant surmotivé à domicile. Quand à Alesi, il échoua une nouvelle fois à Monza, à cause du manque de réactivité de son stand lors de son ravitaillement. Berger sera donc le seul à avoir fait gagner une Benetton après l’ère Schumacher. Il sera celui qui aura apporté la première et la dernière victoire de ce team, entre 1986 et 2001.
La respectabilité de Berger
Après 210 GP dont 10 victoires, le grand Gerhard se retira de la F1 avec panache, suscitant le respect de tous ses contemporrains. L’Autrichien a vite compris qu’il n’avait pas le niveau de ses illustres aînés, Rindt et Lauda. Il a su qu’il ne pourrait pas faire jeu égal avec Prost ou Senna. Difficile de dire s’il est passé à côté de quelque chose, car un pilote comme Nigel Mansell, champion du monde 1992, n’évoluait pas à cent coudées de Berger. Mais par sa fidélité, sa sagesse et sa combativité sur le circuit, Gerhard a laissé sa trace en F1, qui lui a garanti un statut très particulier. En effet, il n’est pas considéré comme faible malgré son rôle chez McLaren auprès de Senna (contrairement à Rubens Barrichello par exemple), et a associé son nom à la réussite de McLaren et Ferrari à des moments historiques. Sa carrière est à l’image du pilote, efficace, pas prétentieuse pour un sou, mais dont le souvenir est durable. Peu de pilotes (à part les champions du monde, et encore) ont réussi à se maintenir si longtemps au sein de top-teams. De 1987 à 1997, Berger n’a connu que le haut de grille, se frottant à 14 titres de champion du monde avec Prost, Senna et Schumacher. A bien y réfléchir, il était difficile de se faire une place au soleil parmi de tels monuments. Berger a su les admirer, admettant qu’il ne les valait pas tout à fait. Peut-être est-ce le secret de sa longévité.
par Jayce
http://www.sportvox.fr/article.php3?id_article=26041
Un début difficile
Débutant sa carrière au GP d’Autriche 1984 au sein du modeste team ATS, Berger vivait son entrée dans le grand bain dans l’ombre de son illustre compatriote Niki Lauda, alors en passe de remporter son troisième titre mondial face à Alain Prost. Le team ATS en manque de moyens, le jeune Autrichien fut absent au Pays-Bas, et inscrit le point de la 6ème place à Monza. Cette performance lui permettra de garantir sa place pour la saison 1985, en intégrant le team Arrows.
Au sein du team anglais, Berger cotoya le Belge Thierry Boutsen, et s’inclina sévèrement 11pts à 3, avec en prime un podium pour son équipier au cours d’une course à élimination sur le circuit d’Imola. Berger, souvent victime de la fiabilité de sa machine, démontre une nouvelle fois sa rapidité et sa combativité. Le team Benetton, rachetant une équipe Toleman en pleine déconfiture, enrôla l’Autrichien pour 1986. C’est à l’occasion de cette saison que Berger va se faire remarquer par les top-teams.
Laminant son équipier Teo Fabi, Gerhard a inscrit 17pts (sur les 19 marqués par le team), dont une belle victoire acquise au Méxique, dominant ainsi les quatre fantastiques qu’étaient Alain Prost, Ayrton Senna, Nelson Piquet et Nigel Mansell. En crevant l’écran de cette manière, Berger s’est ouvert les portes de la Scuderia pour la saison 1987, avec pour mission d’épauler Michele Alboreto afin de redonner à Ferrari son lustre d’antan.
Ferrari, première
Pilote dur et peu spectaculaire, Berger était néanmoins efficace et très fiable malgré sa jeune expérience. Et si Ferrari sera incapable de se battre pour le titre face à Williams, McLaren et Lotus. Le début de saison sera calamiteux et la paire Berger/Alboreto remontera le retard pris au championnat de manière très convaincante. Gerhard signera d’ailleurs deux très belles victoires au Japon et en Australie, après avoir cèdé dans les derniers tours à un Prost redoutable sur le circuit d’Estoril. Cinquième du championnat, Berger continue ainsi son ascension, et s’affirme dans le paddock comme un pilote redoutable et plein de sang froid.
Malheureusement pour lui, la saison 1988 fut le théâtre de l’hégémonie de l’association McLaren-Honda-Prost-Senna. Malgré cette domination sans partage du team de Woking (15 victoires sur 16 GP), Berger exploita la seule possibilité de victoire de l’année. A Monza, après avoir mis la pression sur le leader Ayrton Senna, les deux Ferrari profitèrent de l’accrochage entre le futur champion du monde et la Williams de Schlesser, triomphant quelques semaines après le décès d’Enzo Ferrari. Berger devançant Aboreto, une fois de plus, a rendu un vibrant hommage au Commendatore. Malgré la domination du duo Prost/Senna, Berger termina à la troisième place du championnat du monde.
En 1989, Gerhard Berger étrenna la célèbre Ferrari 639, monoplace ultramoderne créée par le génial John Barnard, et équipée d’une inédite boite de vitesses à sélection séquentielle. Dans cette aventure, il fut rejoint au sein de la Scuderia par Nigel Mansell, au détriment de Michele Alboreto, dominé durant deux saisons par l’Autrichien. Victime de la fiabilité aléatoire de sa Ferrari, Berger a subi la loi de Mansell durant la saison, même s’il a réussi à remporter le GP du Portugal à Estoril. Faisant mieux que Berger, Mansell gagna sa place pour 1990 au sein du team italien, où il sera associé à Alain Prost, champion du monde en titre. Berger, lui, fit le chemin inverse en rejoignant Ayrton Senna chez McLaren.
L’amitié plutôt que l’ambition
La saison 1990 fut celle où Berger s’est résigné à ses espoirs de titre. Au sein d’une équipe entièrement dévouée à Ayrton Senna, l’Autrichien a vite compris qu’il ne pouvait pas soutenir la comparaison avec son illustre coéquipier. Plus humble que Mansell, Berger livra donc un combat face à la Scuderia afin d’aider son team à décrocher les deux couronnes, pilote et constructeur, ce qu’il réalisa avec brio, devançant ainsi son ancien équipier au championnat où il prit à nouveau la troisième place, même si aucune victoire ne le récompensa de ses efforts. C’est la première fois depuis 1985 que l’Autrichien n’a pas remporté le moindre GP.
Berger et Senna sont très vite devenus amis, car si le comportement du Pauliste en piste l’empêchait de se lier avec un concurrent direct (comme Prost), la dévotion de Berger n’était pas un obstacle, et le charisme d’Ayrton était réel hors de sa voiture. Loyaux l’un envers l’autre, le duo remporta une nouvelle fois les deux championnats, Gerhard finissant à la quatrième place du classement des pilotes. Son leader Senna lui offrit une émouvante victoire au Japon, victoire qui faisait défaut à l’Autrichien depuis 1989. Rapide, souvent proche des temps de Senna en qualifications mais rarement devant, Berger avait semble-t-il compris qu’il ne pourrait pas lutter face aux géants de la discipline. Dès lors, il acceptait son rôle, lui garantissant ainsi de se battre aux avant-postes, plutôt que d’être le leader d’une écurie de bas de tableau.
L’année 1992 montrera plusieurs choses. D’une, que le titre n’était pas joué d’avance pour Senna, malgré l’année sabbatique de son grand rival Prost. D’autre part, que le Brésilien pouvait être mis en difficulté par son équipier, classé pourtant comme "porteur d’eau". Face aux géniales Williams-Renault de Nigel Mansell et Riccardo Patrese, les McLaren-Honda ont mordu la poussière, subissant du même coup la loi d’un jeune inconnu, l’Allemand Michael Schumacher. Alors que Mansell survolait le reste du plateau, Patrese étant incapble de suivre son rythme, Senna semblait mal vivre la domination du Britannique. Vainqueur à trois reprises en 1992, le Pauliste voyait d’un très mauvais oeil d’être sorti de la course au titre de cette façon. De plus, le retrait de Honda prévu pour la fin de saison le contrariait terriblement. Dès lors, le triple champion du monde était plus motivé à garantir son avenir pour 1993 qu’à se battre sur la piste. Dans ces circonstances, Berger a fait valoir sa fiabilité, son efficacité et sa sagesse pour faire jeu égal avec son prestigieux leader. Victorieux à Montréal et à Adélaïde, l’Autrichien signait par cette prestation ses adieux au team McLaren, tout en terminant à un petit point de Senna au championnat. Berger n’a pas su résister aux appels d’une Scuderia aux abois, en panne de résultat et de confiance. Gerhard, attaché au team de Maranello, se décida à rejoindre Ferrari pour la deuxième fois de sa carrière, fuyant un team McLaren en train de perdre pied.
Au chevet de la Scuderia
Ferrari est au fond du gouffre lorsque Gerhard Berger a rejoint Maranello. Après la débâcle de la campagne de 1991, aboutissant sur les limogeages de Cesare Fiorio, Alain Prost et Piero Fusaro, la Scuderia pensait refaire surface en 1992, emmenée par le fidèle et talentueux Jean Alesi. Mais la réalité fut bien plus dure, et c’est Ivan Capelli, deuxième pilote, qui en fit les frais. Ferrari était minée par les conflits internes, et il était grand temps de ramener un peu de sérénité au sein du team. Alors Maranello compta sur Alesi, et sur le retour de Berger. Luca Di Montezemolo, président de Automobili Ferrari, ne pouvait plus supporter cette situation d’échec. Et pourtant, 1993 ressembla beaucoup à 92, à ceci près que le duo de pilotes demblait plus complémentaire. Avec seulement trois podiums (deux pour Alesi, un pour Berger), la firme historique semblait bien malade. En juillet, Montezemolo fit appel à Jean Todt, qui avait réussi à faire gagner Peugeot en Rallye, en Rallye-Raid et en Endurance. Berger, lui, rêvait de redonner au team son lustre d’antan, et se lia d’amitié avec le fougueux Alesi.
Les sentiments de l’Autrichien étaient très divergents en 1994. Ferrari semblait revenir aux avant-postes, mais la saison commençait mal, avec une blessure d’Alesi en essais privés. Puis ce fut Imola, où Berger perdit en un week-end son jeune compatriote Roland Ratzenberger puis son ami Ayrton Senna. Pouvant viser la victoire, Berger abandonna sans que la mécanique y soit pour quoique se soit. Jean Todt évoqua un problème d’ammortisseur, mais Berger affronta les médias en expliquant "comment voulez-vous piloter une monoplace les yeux embués par les larmes?" La suite de la saison sera marquée par la victoire de Berger au GP d’Allemagne à Hockeinheim, circuit totalement maîtrisé par le pilote autrichien. Berger a réussi, il a redonné en moins de deux ans les joies de la victoire à son team. Biensûr, certaines voix se sont élevées pour expliquer la chance de Berger à l’occasion de ce GP. Schumacher et Alesi avait abandonné sur surchauffe moteur pourle premier, problème électrique pour le second. Mais avant ça, Berger avait signé la pole devant Alesi, et dominé le champion allemand. Sa victoire ne devait rien à la chance. Du même coup, Ferrari récupéra la troisième place au championnat, au détriment du team McLaren en crise.
En 1995, Alesi et Berger pensait pouvoir redonner un titre à la Scuderia. Loin de sa devancière, la 412T2 était une monoplace simple, performante et... belle. Et Berger s’enthousiasmait face à sa monoplace en début de saison. "Quand une F1 est belle, elle va généralement vite". Et il avait raison, elle allait vite cette Ferrari. Malheureusement, elle n’allait pas très loin. Les ingénieurs de la Scuderia avait tout fait pour fiabiliser le moteur, mais les autres compartiments en ont pâtit. Dès lors, une seule victoire couronna cette monoplace, celle de Jean Alesi à Montréal. Comme en 1990, le team italien s’est pris les pieds dans le tapis pour des broutilles, et les raisons des abandons sont édifiantes: panne de batterie, rupture de roulement de roue, écrou mal serré, caméra embarquée mal fixée, attache de suspension défectueuse... Alors que la régularité du duo de pilotes aurait pu permettre à la Scuderia de jouer le titre constructeur face au duo hétérogène de Benetton-Renault et aux errements de Williams-Renault, le manque de sérieux dans la réalisation de la Ferrari a compromis ses chances. La Scuderia a donc échoué à la troisème place, une nouvelle fois, et empêchant ses pilotes de défendre leurs chances de victoire.
Dernière ligne droite
Lassé par trois saisons difficiles, où il n’a obtenu qu’une seule victoire, Berger a répondu aux avances de Benetton-Renault pour 1996, dans l’espoir de décrocher quelques victoires avant la fin de sa carrière. Il fut rejoint par son ami Jean Alesi, trahi par Jean Todt quand celui-ci a voulu en faire un pilote n°2 derrière Michael Schumacher. Malheureusement, Alesi semblait faire figure de "chat noir", et la B196 s’avéra bien moins véloce que sa devancière. Néanmoins, les deux pilotes ont connu une saison honorable, bien que les errements connus chez Ferrari en 1995 semblaient les avoir suivis. Le duo n’a eu que deux possibilités de victoire en 1996, saison dominée par les Williams-Renault de Damon Hill et Jacques Villeneuve. A Monaco, Alesi dominait habilement ses poursuivants quand un affaissement de suspension le contraignit à abandonner. Quelques semaines plus tard, le sort fut bien plus cruel pour Berger. Abandonnant à Monaco sur un bris de boite de vitesses alors qu’il suivait son équipier, c’est son moteur Renault qui cassa, laissant la victoire à Damon Hill à deux tours de l’arrivée du GP d’Allemagne. Berger ne masque pas sa déception et son ras-le-bol devant ces lacunes, et mis avec Alesi la pression sur Flavio Briatore pour 1997.
Briatore n’est pas homme qu’on menace, et il fit savoir très tôt que 1997 serait la dernière saison de la paire Alesi/Berger. Devant ce constat, l’Autrichien décida de raccrocher son casque à la fin de l’exercice. Une fois encore, chaque pilote à eu l’occasion de vaincre cette saison. Et Berger put en profiter cette fois, triomphant sur le circuit d’Hockeinheim, qu’il domina une fois de plus devant Schumacher, pourtant surmotivé à domicile. Quand à Alesi, il échoua une nouvelle fois à Monza, à cause du manque de réactivité de son stand lors de son ravitaillement. Berger sera donc le seul à avoir fait gagner une Benetton après l’ère Schumacher. Il sera celui qui aura apporté la première et la dernière victoire de ce team, entre 1986 et 2001.
La respectabilité de Berger
Après 210 GP dont 10 victoires, le grand Gerhard se retira de la F1 avec panache, suscitant le respect de tous ses contemporrains. L’Autrichien a vite compris qu’il n’avait pas le niveau de ses illustres aînés, Rindt et Lauda. Il a su qu’il ne pourrait pas faire jeu égal avec Prost ou Senna. Difficile de dire s’il est passé à côté de quelque chose, car un pilote comme Nigel Mansell, champion du monde 1992, n’évoluait pas à cent coudées de Berger. Mais par sa fidélité, sa sagesse et sa combativité sur le circuit, Gerhard a laissé sa trace en F1, qui lui a garanti un statut très particulier. En effet, il n’est pas considéré comme faible malgré son rôle chez McLaren auprès de Senna (contrairement à Rubens Barrichello par exemple), et a associé son nom à la réussite de McLaren et Ferrari à des moments historiques. Sa carrière est à l’image du pilote, efficace, pas prétentieuse pour un sou, mais dont le souvenir est durable. Peu de pilotes (à part les champions du monde, et encore) ont réussi à se maintenir si longtemps au sein de top-teams. De 1987 à 1997, Berger n’a connu que le haut de grille, se frottant à 14 titres de champion du monde avec Prost, Senna et Schumacher. A bien y réfléchir, il était difficile de se faire une place au soleil parmi de tels monuments. Berger a su les admirer, admettant qu’il ne les valait pas tout à fait. Peut-être est-ce le secret de sa longévité.
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