À quoi servent les essais hivernaux ? (1/2)
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À quoi servent les essais hivernaux ? (1/2)
À quoi servent les essais hivernaux ? (1/2)
Par Jacky Eeckelaert le 19/02/2015 à 10:30 2 Commentaires
L’ingénieur Jacky Eeckelaert, qui a travaillé pour les écuries Jordan, Prost GP, Sauber, Honda et HRT (avant de rejoindre le championnat DTM en tant que directeur technique de l’écurie officielle Audi Sport Abt) nous dévoile le travail de l’ombre mené par les écuries lors des essais hivernaux, loin de la chasse aux chronos…
QUELLES LEÇONS PEUT-ON TIRER DES TESTS ?
Il est hasardeux de tirer des conclusions des essais de présaison en ne consultant que la feuille des temps, car personne ne roule avec la même quantité d’essence ni les mêmes pneus. Certains passent les tendres avec 20 kg d’essence, d’autres avec 60 kg, ce qui crée une différence de quasiment 0,35 sec au tour par 10 kg d’essence à Barcelone. Il faut donc plutôt examiner le comportement de la voiture lors de longs runs, et garder à l’esprit que certains peuvent cacher leur jeu, en roulant toujours avec beaucoup d’essence.
La seule donnée objectivement analysable, c’est la fiabilité. Et en la matière, Mercedes, Ferrari, Williams et aussi Toro Rosso figurent en bonne posture.
Les essais s’étalent d’ordinaire sur plusieurs séances. Cet hiver, après quatre jours passés à Jérez au début du mois, deux autres sessions sont prévues à Barcelone : la première commence aujourd’hui (à suivre en live, bien sûr !), la seconde se tiendra du 26 février au 1er mars. À cette saison, l’Espagne offre des températures relativement douces et le déplacement reste moins onéreux que Bahreïn. Jérez est un bon choix pour un premier roulage, alors Barcelone permet de mieux évaluer l'appui généré sur la voiture et la dégradation des pneumatiques.
PREMIÈRE PHASE
Les premiers jours, on commence par contrôler le bon fonctionnement du groupe propulseur, le “drive train” dans le jargon, c’est-à-dire l’ensemble formé par le moteur hybride (composé du V6 thermique et des systèmes de récupération d’énergie) et la boîte de vitesses.
On vérifie notamment que les puissances délivrées par le moteur à combustion interne et par les deux moteurs électriques (MGU-K et MGU-H) correspondent bien aux chiffres attendus. La puissance électrique, par exemple, est mesurée en kW en multipliant le courant par la tension, à l’entrée et à la sortie. Le MGU-H fonctionne comme moteur pendant le freinage afin de conserver le régime de rotation de la turbine (pour éviter le “temps de réponse”) et comme alternateur en phase d’accélération (pour le MGU-K c’est l’inverse). Concernant la transmission, le pilote s’assure que tous les rapports passent sans accroc, etc.
REFROIDISSEMENT
Ensuite, ou en même temps, on contrôle le refroidissement, qui est devenu un paramètre très complexe sur les V6 hybrides… Auparavant, il s’agissait seulement de refroidir l’eau et l’huile du moteur, ainsi que l’huile de la transmission. Aujourd’hui, il faut rafraîchir aussi les deux systèmes de récupération d’énergie, les 25 kg de batteries qui y sont associées, sans oublier l’air passé par le compresseur avant son admission dans le V6. Après cinq ou six tours, les températures se stabilisent et on peut les mesurer à l’aide de thermocouples ou d’autocollants Thermax – qui changent de couleur selon la température – qui sont placés un peu partout sur la voiture (radiateurs, boîtiers électroniques, bras de suspensions arrière, etc.).
Même s’il ne fait que 15 °C à Jérez ou Barcelone, les ingénieurs sont capables – en roulant avec les radiateurs pleinement ouverts – d’extrapoler les températures de fonctionnement des différents systèmes dans des conditions nettement plus chaudes, entre 30 et 35 °C, semblables à celles que l’on rencontrera pendant la saison. Si les températures sont trop élevées (au niveau de la boîte, du moteur des batteries ou des générateurs électriques), l’écurie sait qu’elle doit revoir sa copie.
MESURE DE LA CONSOMMATION RÉELLE
À ce stade-là, on balaie aussi les différentes configurations de récupération d’énergie : le pilote passe en revue les réglages en fonction de la quantité d’énergie que l’on souhaite recouvrer en activant les molettes du volant. Cela permet par ailleurs de vérifier la bonne marche du freinage électronique (“brake by wire”), qui travaille en relation avec la récupération d’énergie.
Bref, le pilote “scanne” l’éventail des possibilités offertes sur le volant, afin de mettre tous les systèmes à l’épreuve. Pas de pitié ! Car il vaut mieux casser une pièce à Barcelone plutôt qu’à Melbourne. Une voiture configurée pour des essais embarque beaucoup plus de capteurs qu’une monoplace utilisée en course.
Enfin, la consommation d’essence est évaluée assez précisément. Les ingénieurs sont capables d’estimer la consommation à partir des temps d’ouverture des injecteurs fournis par la télémétrie, mais ils préfèrent souvent corroborer cette approximation par une mesure réelle. Ils font alors rouler la voiture pendant 20 tours avec 100 kg d’essence embarqués, puis vident le réservoir et calculent ce qui reste. S’ils constatent un écart entre ces deux valeurs (qui ne doit normalement pas excéder 1 %), ils établissent un coefficient correcteur dont ils se serviront pendant la saison.
Si le groupe propulseur fonctionne comme prévu et se montre fiable, l’équipe peut passer à la phase d’évaluation du châssis – que nous examinerons en détail dimanche, si vous le voulez bien.
Propos recueillis par Nicolas Carpentiers.
http://www.f1i.com/f1i-features/quoi-servent-les-essais-hivernaux-12/
Par Jacky Eeckelaert le 19/02/2015 à 10:30 2 Commentaires
L’ingénieur Jacky Eeckelaert, qui a travaillé pour les écuries Jordan, Prost GP, Sauber, Honda et HRT (avant de rejoindre le championnat DTM en tant que directeur technique de l’écurie officielle Audi Sport Abt) nous dévoile le travail de l’ombre mené par les écuries lors des essais hivernaux, loin de la chasse aux chronos…
QUELLES LEÇONS PEUT-ON TIRER DES TESTS ?
Il est hasardeux de tirer des conclusions des essais de présaison en ne consultant que la feuille des temps, car personne ne roule avec la même quantité d’essence ni les mêmes pneus. Certains passent les tendres avec 20 kg d’essence, d’autres avec 60 kg, ce qui crée une différence de quasiment 0,35 sec au tour par 10 kg d’essence à Barcelone. Il faut donc plutôt examiner le comportement de la voiture lors de longs runs, et garder à l’esprit que certains peuvent cacher leur jeu, en roulant toujours avec beaucoup d’essence.
La seule donnée objectivement analysable, c’est la fiabilité. Et en la matière, Mercedes, Ferrari, Williams et aussi Toro Rosso figurent en bonne posture.
Les essais s’étalent d’ordinaire sur plusieurs séances. Cet hiver, après quatre jours passés à Jérez au début du mois, deux autres sessions sont prévues à Barcelone : la première commence aujourd’hui (à suivre en live, bien sûr !), la seconde se tiendra du 26 février au 1er mars. À cette saison, l’Espagne offre des températures relativement douces et le déplacement reste moins onéreux que Bahreïn. Jérez est un bon choix pour un premier roulage, alors Barcelone permet de mieux évaluer l'appui généré sur la voiture et la dégradation des pneumatiques.
PREMIÈRE PHASE
Les premiers jours, on commence par contrôler le bon fonctionnement du groupe propulseur, le “drive train” dans le jargon, c’est-à-dire l’ensemble formé par le moteur hybride (composé du V6 thermique et des systèmes de récupération d’énergie) et la boîte de vitesses.
On vérifie notamment que les puissances délivrées par le moteur à combustion interne et par les deux moteurs électriques (MGU-K et MGU-H) correspondent bien aux chiffres attendus. La puissance électrique, par exemple, est mesurée en kW en multipliant le courant par la tension, à l’entrée et à la sortie. Le MGU-H fonctionne comme moteur pendant le freinage afin de conserver le régime de rotation de la turbine (pour éviter le “temps de réponse”) et comme alternateur en phase d’accélération (pour le MGU-K c’est l’inverse). Concernant la transmission, le pilote s’assure que tous les rapports passent sans accroc, etc.
REFROIDISSEMENT
Ensuite, ou en même temps, on contrôle le refroidissement, qui est devenu un paramètre très complexe sur les V6 hybrides… Auparavant, il s’agissait seulement de refroidir l’eau et l’huile du moteur, ainsi que l’huile de la transmission. Aujourd’hui, il faut rafraîchir aussi les deux systèmes de récupération d’énergie, les 25 kg de batteries qui y sont associées, sans oublier l’air passé par le compresseur avant son admission dans le V6. Après cinq ou six tours, les températures se stabilisent et on peut les mesurer à l’aide de thermocouples ou d’autocollants Thermax – qui changent de couleur selon la température – qui sont placés un peu partout sur la voiture (radiateurs, boîtiers électroniques, bras de suspensions arrière, etc.).
Même s’il ne fait que 15 °C à Jérez ou Barcelone, les ingénieurs sont capables – en roulant avec les radiateurs pleinement ouverts – d’extrapoler les températures de fonctionnement des différents systèmes dans des conditions nettement plus chaudes, entre 30 et 35 °C, semblables à celles que l’on rencontrera pendant la saison. Si les températures sont trop élevées (au niveau de la boîte, du moteur des batteries ou des générateurs électriques), l’écurie sait qu’elle doit revoir sa copie.
MESURE DE LA CONSOMMATION RÉELLE
À ce stade-là, on balaie aussi les différentes configurations de récupération d’énergie : le pilote passe en revue les réglages en fonction de la quantité d’énergie que l’on souhaite recouvrer en activant les molettes du volant. Cela permet par ailleurs de vérifier la bonne marche du freinage électronique (“brake by wire”), qui travaille en relation avec la récupération d’énergie.
Bref, le pilote “scanne” l’éventail des possibilités offertes sur le volant, afin de mettre tous les systèmes à l’épreuve. Pas de pitié ! Car il vaut mieux casser une pièce à Barcelone plutôt qu’à Melbourne. Une voiture configurée pour des essais embarque beaucoup plus de capteurs qu’une monoplace utilisée en course.
Enfin, la consommation d’essence est évaluée assez précisément. Les ingénieurs sont capables d’estimer la consommation à partir des temps d’ouverture des injecteurs fournis par la télémétrie, mais ils préfèrent souvent corroborer cette approximation par une mesure réelle. Ils font alors rouler la voiture pendant 20 tours avec 100 kg d’essence embarqués, puis vident le réservoir et calculent ce qui reste. S’ils constatent un écart entre ces deux valeurs (qui ne doit normalement pas excéder 1 %), ils établissent un coefficient correcteur dont ils se serviront pendant la saison.
Si le groupe propulseur fonctionne comme prévu et se montre fiable, l’équipe peut passer à la phase d’évaluation du châssis – que nous examinerons en détail dimanche, si vous le voulez bien.
Propos recueillis par Nicolas Carpentiers.
http://www.f1i.com/f1i-features/quoi-servent-les-essais-hivernaux-12/
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